Trente ans après sa disparition, René Nelli apparaît à ses amis et à ses lecteurs comme un guetteur nocturne au carrefour des savoirs, des langues, des disciplines et des créations philosophiques et littéraires du XX ème siècle. Attaché à Carcassonne, sa ville natale où pendant vingt-cinq ans il fut le proche veilleur de Joë Bousquet, il ouvre sa curiosité de grand voyageur imaginaire aux univers littéraires et culturels insolites, oubliés, dominés. Poète, il déroute très vite son surréalisme premier vers un monde méditerranéen qu’il figure toujours dans le chassé croisé entre deux langues : occitan et français. Philosophe, il saisit d’un même regard les questions métaphysiques des docteurs cathares et les événements qui forment la trame de tous les destins, dont le sien. Ethnologue du passé médiéval et du présent paysan, il médite les formes étonnantes - rituelles et plastiques, matérielles et poétiques - que les cultures du Sud ont inventé dans l’épaisseur des siècles. On le retrouve à tous les lieux de surgissement : en 1930, aux Cahiers du Sud, près de Jean Ballard ; en 1938 quand s’invente une ethnologie de la France, autour de Georges-Henri Rivière ; en 1945, à l’Institut d’Études Occitanes (qu’il fonde avec Tristan Tzara, Jean Cassou et Ismaël Girard), quand la culture d’oc aspire à retrouver sa grandeur. Curieux de tout, prêt à s’embarquer à tout moment vers les au-delà de la connaissance, René Nelli reste un penseur et un poète hérétique, à l’écart des engouements et des pouvoirs. Ce volume présente les facettes souvent insolites de cette œuvre d’autant plus moderne qu’elle n’a jamais voulu l’être.